Jacques Blaise Mvié, au tribnal: "J’étais pratiquement dans la confidence de Rémy Ze Meka"

Le journaliste parle de ses sources dans l'armée, de sa complicité passée avec l'ex. ministre de la Défense, de la protection que Paul Biya lui a accordée...

 

Au cours de son interrogatoire, Jacques Blaise Mvié, le Dp du journal La Nouvelle a fait des révélations sur la nature des relations qu’il entretenait avec l’ex-ministre délégué à la présidence chargé de la Défense : «J’étais pratiquement dans la confidence du Mindef Remy Ze Meka, c’est la raison pour laquelle j’avais des facilités pour avoir et recouper des informations auprès de lui. J’avais son numéro de téléphone, je n’avais pas besoin de Doko Jérémie, que je ne connaissais d’ailleurs pas avant ce procès, pour avoir ces informations. Je rencontrais le Mindef comme un ancien du séminaire d’Akono, il faisait partie de nos aînés. Il m’a demandé de travailler avec lui lorsque j’ai quitté La nouvelle Expression et alors qu’il venait d’être nommé aux fonctions de Sed. »

Interrogé sur la similitude entre les informations classées secret défense publiées par son journal et les documents saisis chez Doko Jérémie, le journaliste déclare n’avoir jamais rencontré l’intéressé. « Nous avons eu diverses informations à travers plusieurs sources. Les informations concernaient la préservation de la paix. Nous avons fait plusieurs recoupements et j’ai appelé le Mindef pour vérifier les informations que j’avais avant leur publication. C’était un lundi et le chef de l’Etat allait ce jour là en France où il devait rencontrer pour la première fois Sarkozy. Le Mindef m’a envoyé le commandant Eloundou Mesmin que j’ai rencontré derrière la mairie de Yaoundé VI à Biyem-assi vers 19heures. Il m’a dit que ces informations étaient vraies à 90%, mais que le Mindef manifestait des réticences par rapport au traitement que nous allions faire».

La brouille avec le Mindef, révèle Mvié, est consécutive à l’affaire que la presse a présentée comme un vrai faux coup d’Etat. Une semaine plus tôt j’avais parlé des « rumeurs sur le coup d’Etat » dans mon journal. J’ai appelé le Mindef qui m’a dit que s’il y avait coup d’Etat, « vous seriez le premier à être informé ». J’ai été ensuite appelé à la présidence de la République où des informations m’ont été données sur les dessous de ces rumeurs de coup d’Etat. C’est à ce moment que j’entre en conflit ouvert avec le Mindef. J’ai été enlevé par la Semil, séquestré pendant trois jours et sorti sur instructions du président de la République qui a demandé qu’un seul cheveu de celui qui le premier a dénoncé ne soit touché. Au cours de l’enquête menée par le colonel Tchinda, on m’a demandé si je connaissais Doko Jérémie. C’est sur la base de cette enquête que j’ai été condamné ».

Sur ses sources d’informations, Mvié affirme que parfois on les trouve sous la porte de la rédaction. Elles sont laissées par des informateurs qui évoluent à visage couvert. C’est ainsi que nous avons fait un dossier sur les âges des officiers supérieurs de l’armée sur la base d’informations obtenues de cette manière.


Jérémie Doko: «L’homme de renseignement de Rémy Ze Meka»

Intervenant à son tour devant la barre de la Cour d’appel hier, le Maréchal des logis chef Doko Jérémie déclare que, en sa qualité d’homme du renseignement, il a travaillé avec le « groupe des patriotes » composé de généraux, d’autorités civiles et militaires dans le but de préserver la paix et garantir la sécurité de notre pays. En tant que homme du renseignement, ils avaient toujours besoin de mes services, même en retraite. On a travaillé ensemble mais, ils étaient chargés d’acheminer les correspondances à la haute autorité républicaine : le chef de l’Etat. « J’ai travaillé avec Ze Meka que j’ai connu à travers Mva Albert, un conseiller du Chef de l’Etat. Ce dernier m’a adopté comme son fils, brave garçon et homme de renseignement atypique. J’aidais Ze Meka dans le renseignement et nous avons gardé de bonnes relations. Nommé au Sed, il m’a plusieurs fois demandé de l’aider comme je connaissais la maison. J’ai alors commencé à lui donner des renseignements sur tout, y compris lui-même et qui ne le caressaient pas dans le sens du poil. C’est alors qu’il a commencé à s’irriter, à me gronder et à se méfier de moi. Quand on l’a nommé Mindef, il m’a appelé et on a fait un semblant de paix.

« La brouille, révèle Doko, est partie de son refus de mon évacuation en France au Val de Grâce pour une opération du crâne. J’avais pourtant touché les droits de l’homme par rapport à mon droit à la vie et à la santé. Le Mindef a été saisi le 18 septembre 2007 via le Sgpr. Il est resté catégorique. Je l’ai rencontré plus de dix fois, il m’a rassuré que ce sera fait alors qu’il m’endormait. Finalement, je n’ai pas voyagé.

Sur les circonstances dans lesquelles les prises de vues des installations militaires ont été faites, Doko Jérémie déclare : « elles ont été faites en avril et juillet 2002 à Bakassi où j’ai été régulièrement désigné en mission par la plus haute autorité républicaine. Le général Benae Mpecke a rencontré Esso Laurent alors Mindef pour des instructions allant dans le sens de cette mission spéciale. A l’époque, on attendait le verdict de la Cour internationale de justice de la Haye sur le conflit de Bakassi et les nigérians s’agitaient sur le terrain. Il fallait envoyer un homme du renseignement incorruptible. J’ai été cet homme là. Il ya eu une réunion de l’Etat major de l’armée avec tous les généraux en fin mars 2002 et on m’a demandé d’exprimer mes besoins. La mission était commandée par le Mindef et j’ai eu des ordres de mission et des moyens spéciaux : caméras, appareils photos et dictaphones numériques. Le matériel m’a été remis une semaine après et les ordres de mission étaient dument signés du Mindef.

Autre révélation de Doko Jérémie, « Je transportais des documents pour les officiers supérieurs : le général Semengue, chef d’Etat major des armées à l’époque, le général Asso Emane, Commandant de la première région militaire d’alors et des documents. pour la Direction de la surveillance du territoire ».

A l’issue de l’audition des trois accusés appelants, la chambre militaire a renvoyé la cause au 29 juillet 2010 pour les réquisitions de l’Avocat général et les plaidoiries de la défense.

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