Washington réduit ses ambitions sur le dossier palestinien

LE MONDE | 08.10.09 | 15h36  •  Mis à jour le 08.10.09 | 20h44

New York Correspondant

La résolution du conflit israélo-palestinien paraît aujourd'hui si mal engagée aux Etats-Unis qu'elle est descendue de plusieurs échelons dans le traitement médiatique de l'actualité. Les récents affrontements à Jérusalem n'ont pas fait de gros titres. L'arrivée dans la région, mercredi 7 octobre, de George Mitchell, l'envoyé spécial du président Barack Obama, ne suscite plus, en dehors des spécialistes, qu'un intérêt poli.

 

La spectaculaire relance du "processus de paix" avait beaucoup surpris, lorsque M. Obama avait désigné son envoyé spécial au Proche-Orient deux jours seulement après son intronisation. Huit mois et demi plus tard, le constat général est que la diplomatie américaine a subi des revers. Le président n'a pas obtenu, comme il le souhaitait, un gel de la colonisation israélienne. Le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, a même été jusqu'à annoncer la construction de nouvelles unités d'habitation la veille de l'arrivée de M. Mitchell. Quant à Mahmoud Abbas, le président de l'Autorité palestinienne, son incapacité à obtenir le moindre gain politique de son interlocuteur israélien, sans parler d'une levée du blocus économique imposé par Israël à Gaza, ne le décrédibilise pas seulement aux yeux de ses compatriotes.

Sujet tabou

Dans les grands think tanks démocrates, cette faiblesse est désormais aussi perçue comme le signe d'un nécessaire changement de cap. Car à les écouter, la "relance" du processus de paix a fait à ce jour deux perdants - MM. Obama et Abbas - et deux gagnants : M. Nétanyahou et le Hamas.

Le discours du Caire du président américain au monde arabo-musulman, le 4 juin, avait laissé entrevoir beaucoup d'espoir. Après que M. Obama eut renoncé à imposer à M. Nétanyahou un gel des colonies, "il s'est retrouvé dans la désagréable situation de devoir cajoler" M. Abbas et le monde arabe pour faire passer la pilule, écrit David Makovsky, directeur d'études au Washington Institute for Near East Policy (Winep), un groupe de réflexion américain proche du Likoud. Résultat : M. Obama devait exposer les grandes lignes d'un plan de paix à l'occasion de l'Assemblée générale de l'ONU. Celle-ci est terminée depuis deux semaines et plus personne n'évoque cette ambition.

Mercredi, un correspondant diplomatique du Washington Post s'attaquait à un tabou : "Que faire avec le Hamas ?" Il rappelait que M. Mitchell, lorsqu'il était médiateur dans le conflit nord-irlandais, avait été confronté à une exigence vis-à-vis de l'IRA similaire à celle posée au Hamas par la communauté internationale (la Grande-Bretagne exigeait que cette organisation dépose les armes avant d'engager toute négociation). Plus tard, il avait expliqué pourquoi il avait fallu sortir de la logique des ultimatums : "Il est difficile de mettre fin à une guerre si vous ne parlez pas à ceux qui la font."

Aujourd'hui, se demande le quotidien, comment peut-on avancer alors que le Hamas, qui démontre quotidiennement combien il est incontournable, est exclu du jeu ? Cela, dans une situation où Israël n'a aucune intention de réoccuper Gaza, où le Hamas est maître, et où M. Abbas, l'interlocuteur reconnu par la communauté internationale, ne dispose d'aucun moyen pour le vaincre politiquement.

Sylvain Cypel
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